C’est un sujet qui nous enseigne sur la nature phonétique de la langue bretonne au cours de l’histoire du dernier millénnaire jusqu’au présent. La compréhension la plus exacte des mouvements des changements phonétiques dans la langue sont aussi un atout pour comprendre l’existence de formes divergentes des noms de lieux, divergences qui nous aident à mieux cerner l’étymologie de ces noms de lieux en confirmant ou infirmant certaines possibilités d’interprétation.
Les histoires du développement des langues – toutes comme celle du breton représenté par le Historical Phonology of Breton de Kenneth Jackson (1967) – donnent des dates de changement d’un son langagier à un autre basé sur les graphies des écrits parvenus jusqu’à nous. Il est important de rappeler le consensus général dans la littérature concernant la linguistique historique que chaque date proposée pour un changement phonétique provenant de sources écrites doit avoir été précédée d’un certain laps de temps dans les parlers. Moins évidents dans la même littérature est la qualification qu’un changement survenu dans l’écriture est représentatif d’un dialecte favorisé plutôt que d’autres, et cet aspect des choses est obscuri pour des raisons de manquement sérieux de documentation pour l’époque médiévale, par exemple.
Les atlas linguistiques – toutes comme celles du breton, notamment l’ALBB et le NALBB – s’ils n’ont qu’une profondeur très restreint du point de vue de l’évolution d’une langue, sont par contre très adeptes à montrer à leurs lecteurs les aires dialectales de chaque forme parlée recueillie.
Les langues étant des phénomènes mouvants (on n’ose pas dire vivants), ils subissent des changements phonétiques sur l’axe temporel et montrent des résultats de changements modérés par l’axe spatial et ce décalage sur l’axe spatial tend à permettre la coexistence d’incohérences dans la langue, incohérences qui peuvent à leur tour amorcer des changements phonétiques (hypercorrections, formes de compromis), en un mot, ils subissent des changements dynamiques. Le dynamisme des langues se comprend donc spatio-temporellement, mais un aspect de la solution manque pour mieux compléter la synthése des deux approches pour comprendre plus parfaitement le développement d’une langue, c’est d’employer les formes écrites historiques des noms de lieux pour accéder au développement dynamique d’une langue. Dans le cas du breton, ce travail se fait en deux volets :
- Primo, le recueil de toutes formes écrites de noms de lieux qui peuvent nous donner quelques renseignements phonétiques sur l’entiéreté de la Basse-Bretagne depuis 1400 jusqu’à aujourd’hui (c.-à-d. dans une continuation historique de six siècles). Avant 1400, la l’exhausivité des données toponymiques est beaucoup moindre ;
- Secundo, le recueil de toutes les prononciations bretonnes locales de toponymes dans chaque localité (se bornant surtout aux lieux habités, par souci de logistique du possible).
Cela faisant, nous pouvons espérer continuer l’œuvre magistrale de Jackson qui ne traite pas bien le développement phonétique du breton après l’époque médiévale, vu le manque de matériaux qu’il possédait. Ce livre se focalise donc sur une classification plus précise des sons du breton, la distribution de ces sons dans la Bretagne bretonnante, et de la nature des changements phonétiques intervenus en breton depuis 1400. (La question de la vocabulaire et de la grammaire du breton seront abordés dans un autre œuvre compagnonne Noms de lieux de la Basse-Bretagne).
POSTÉ juillet 2025.