Apres avoir eu un peu de pratique interviewant plusieurs informateurs, le chercheur de terrain qui recueille les toponymes bretons constatera – s’il écoute attentivement – qu’il existe souvent des variantes de prononciations qui sont plus évoluées (soit soumises aux aléas de la francisation, ou à l’interférence due aux formes écrites, à des influences de dialectes voisins) et d’autres qui sont plus conservatrices (voir meme archaïques si l’on tient compte de certaines formes de la littérature orale). Comment faire pour bien présenter et catégoriser cette variation qui montre les divers stades et influences présent dans le répertoire oral des bretonnants interrogés ? C’est une question délicate qui mérite qu’on s’y attarde.
Présentation sans compromis des faits phonétiques rencontrés
Le toponymiste irlandais, Breandán Ó Ciobháin (1985) soutient, de manière probante, le besoin de transcrire, méthodiquement et sans manipulation, les prononciations locaux traditionnelles comme l’enquêteur les a entendues :
“Toutes les versions des noms fournies par chaque informateur sont publiées. Bien que cela puisse paraître superflu, cela peut être justifié par le fait que c’est presque certainement la dernière fois que les noms seront enregistrés … Là encore, si de nombreuses versions sont linguistiquement corrompues ou idiosyncrasiques, émanant d’un milieu de déchéance linguistique, leur exclusion non seulement dissimulerait la nature et la qualité mêmes des preuves, mais préjugerait également leur potentiel jusqu’ici inexploré. Dans ce matériel, par exemple, on peut observer non seulement les transformations subies par les noms eux-mêmes dans les dimensions diachronique et synchronique, mais aussi les étapes et la nature même du processus de délabrement linguistique.”
Dans maintes parties du comté de Kerry, où Ó Ciobháin travaillait dans les années 1960, les meiilleurs informateurs étaient les enfants ou grand-enfants de la dernière géneration de langue gaélique irlandaise. Beaucoup des toponymes étaient des microtoponymes qui n’avaient aucune reconnaissance à l’écrit donc on pouvait être confiant dans son cas qu’il s’agissait de formes de transmission orale.
Nous approuvons la politique d’Ó Ciobháin : il faut donner aux lecteurs les faits phonétiques d’une façon aussi minutieuse qu’ils ont étés rencontrées, bien qu’à cela il faut ajouter des mises en gardes importantes.
En Basse-Bretagne